Interview de chercheur

Marie-Hélène Muller, chercheuse à l’INRA de Montpellier nous parle du blé.

Vous avez conduit un projet de recherche sur le blé au Maroc. Quel type d’agriculture rencontre-t-on pour le blé en Afrique du Nord ?

MHM : Nous avons rencontré deux types d’agriculture : une agriculture intensive dans les zones de grandes plaines, et une agriculture de type familial plus traditionnelle dans des zones plus reculées. J’entends par exploitation traditionnelle de petites exploitations diversifiées d’agriculture et d’élevage, au sein desquelles les agriculteurs produisent leurs propres semences et consomment une partie de la récolte. C’est plutôt sur ces systèmes traditionnels que notre travail porte, sachant qu’ils sont en fait intermédiaires avec une interaction de plus en plus importante avec l’agriculture moderne.

La diversité du blé est importante au Maroc. Qu’est-ce qui crée une telle diversité morphologique et génétique ?

MHM : On détecte au sein des systèmes traditionnels de la diversité à différents niveaux. Au sein d’un même champ, on observe une grande diversité morphologique notamment au niveau des épis, contrairement à l’homogénéité constatée dans des parcelles d’agriculture intensive. Mais la diversité se détecte également entre différents champs, y compris pour une même variété. Deux mécanismes principaux expliquent cette diversité. D’une part, une sélection est opérée par les agriculteurs, qui vont choisir eux-mêmes leurs semences pour les années suivantes. Ces choix se font selon des critères environnementaux et en fonction des usages et des préférences. D’autre part, il existe des échanges de semences entre agriculteurs, qui permettent de faire circuler la diversité génétique. On voit donc que les agriculteurs ont un rôle central dans le maintien de la diversité génétique. Celle-ci peut-être décryptée au niveau de la recherche, mais le résultat de ces recherches doit ensuite être partagé avec les agriculteurs et les responsables techniques, afin de mettre en évidence l’importance des pratiques culturales pour l’évolution de la diversité.